C'est un homme, il est venu au milieu de la piste. Personne ne l'y obligeait, il est venu de son plein gré. Il est venu parce qu'il avait envie de raconter des histoires. Comme il ne savait pas comment, il a tout apporté, il n'a rien laissé au vestiaire. Il a pris ses accessoires, ses instruments, il a pris aussi tout ce que son corps savait faire, mais pas seulement. il a pris aussi les mots malhabiles, les silences, les gestes hésitants. Il a pris les fous rires, les envies secrètes, les faux pas et les tremblements. Il a pris le trouble de son corps, les caresses, les baisers furtifs. Il a pris les jeux d'enfance, les coups de clairon sonores, l'insouciance et la peur. Et sa légèreté d'aviateur.. Bref, il est venu tout entier. Autour de lui, des gens. Il pourrait les prendre pour des spectateurs, mais non, il sait bien qu'ils sont beaucoup plus que ça, que ce sont des gens. Qu'ils sont venus tous entiers, eux aussi. Qu'ils ont presque aussi peur que lui de ce qui va naître. Qu'ils ne se ressemblent pas. Il aimerait bien les connaitre. Ils sont à deux pas de lui, juste au bord de la piste, dans l'ombre, mais pas dans le noir. C'est tentant. Alors quand il a dit bonjour à tout le monde, il met une robe de princesse, prend son petit violon, et le spectacle commence.