La lumière habille délicatement le plateau pour nous laisser découvrir la sculpturale silhouette et la voix de Malgorzata Czajowska. D'une voix profonde et teintée d'un charmant accent de marseillaise cosmopolite, elle se raconte littéralement de la tête aux pieds, dans un portrait déclamé plein d'humour et de poésie. Un portrait transposé et exploré dans un solo prenant sens et essence dans le rythme du phrasé. Une variation laissant le champ libre aux lignes pures et puissantes de la danseuse.
Déjà Katharina Christl tisse pour nous une toile de précieux mouvements questionnant sur la perception de l'identité, de ce qui constitue une identité.
Le canevas chorégraphique de Christl se resserre ou se libère au fil de la pièce, évoquant avec ces glissements identitaires les exceptions de la nature ou de la société. Les danseurs se muent alors en véritables personnages évoquant la cécité, la gémellité ou la ressemblance, le couple ou la dualité.
Ainsi Vito Giotta danse les yeux totalement fermés avec ses partenaires, David le Thaï saisi d'une frénésie toute acrobatique, danse un incroyable solo comme un duel -peut-être- avec une identité imaginaire.
La fresque chorégraphique est émaillée de prouesses techniques et de scènes de chœur exécutées au millimètre avec notamment une variation de quasi transe portée par le son de Steve Reich et subtilement interpellée par les créations vidéos de Jean Christophe Aubert. L'humour est aussi une constituante capitale de ce ballet, simplifiant le propos et servi par un casting d'interprètes impeccables.
Il n'y a pas de règle applicable à l'Identité de l'Etre, tout en chacun de nous n'est qu'affaire de perception et de subjectivité, d'interprétation. C'est là la seule généralité applicable à la chorégraphie de Katharina Christl, portée par des interprètes intelligents, libres et habiles dont nous avons plaisir à suivre la quête identitaire.
par Agnès Rosa-Sentinella
photos Didier Philispart
