Laurent Gutmann élabore une version doucement provocatrice du conte de Perrault, donnant à la célèbre histoire un tour humoristique et très contemporain qui met en relief ses aspects cauchemardesques. Il met en scène un Petit Poucet fils unique que ses parents entraînent dans une fausse partie de cache-cache afin de s’en débarrasser et d’avoir le champ libre pour faire du sport. Croyant échapper au loup, le Petit Poucet se laisse fasciner par la demeure clinquante d’un couple tout ce qu’il y a de glamour... et se jette droit dans la gueule de l’ogre. Abandon, mensonge, cruauté et dévoration, tous les ingrédients sont réunis pour faire frissonner le spectateur. La cellule familiale devient un champ d’observation, car là où Perrault moralise, Laurent Gutmann analyse.
Exploitant avec adresse la capacité suggestive de la forme dialoguée, il évoque avec finesse les relations de couple et les attentes projectives des parents. Il passe ainsi à la moulinette de l’absurde la question de l’éducation, promenant dans un univers fantasmé un héros pas si naïf qui ressortira de son parcours affranchi des manipulations et des fausses promesses des grands.