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Corderie : L'impossible compromis

Le Préfet a rassemblé les acteurs du dossier de la Corderie pour une réunion d'information, mais la situation reste bloquée. Annuler le projet semble difficile juridiquement et la pression populaire est toujours aussi forte. C'est désormais à la Ministre de trancher.

Publié par Jean-Baptiste Fontana le 31/08/2017
Corderie : L'impossible compromis

Stéphane Bouillon, le Préfet de Région, a rassemblé ce jeudi les différents acteurs du dossier des fouilles de la Corderie. Durant trois heures, les équipes de la DRAC et de l’INRAP ont échangé avec les représentants des habitants ( élus, collectifs et CIQ ) pour tenter d’expliquer le déroulé des fouilles et le projet à venir.

«C’est la Ministre qui prendra la décision à partir des arguments échangés» Stéphane Bouillon, Préfet de Région

Face aux pouvoir publics, Benoît Payan, de l’opposition PS municipale lui apporte la contradiction : « Dans la ville la plus vieille de France, ça a du sens de protéger la plus vieille carrière de France. On trouve un site antique extraordinaire et au final on ne garderait qu’un simple jardin ? ».

« La conservation de l’intégralité du la carrière ne se justifie pas d’un plan scientifique » lui répond Dominique Garcia, le président de l’INRAP. Le fait d’avoir largement étudié la zone à détruire est une « conservation en soi », une « sauvegarde par l’étude » selon les scientifiques présents qui approuvent ainsi la décision de détruire une partie du site afin d’y construire un immeuble.

Seuls 625m² seront sauvegardé sur un site de 4200m² au total dont 2700 m² liés à la carrière. Le site a été fouillé par l’INRAP entre les mois d’avril et fin juin 2017.

 

Annuler le projet immobilier ? Un casse tête juridique annoncé

Depuis une quinzaine d’année les opposants au projet tentent de le bloquer. Les différents recours ont tous été perdus et depuis la découverte officielle des vestiges en début d’année, tout a été mené dans les règles.

Le dernier élément, c'est l’attestation de libération des terrains suite à la fin de la fouille signée du Préfet. Ce document indique que la fouille est terminée et que Vinci peut donc désormais commencer les travaux légalement. Cet arrêté précise également la zone de 625m² protégée à laquelle l’entreprise ne doit pas toucher.

Juridiquement, c’est donc désormais très compliqué pour la DRAC, le Préfet ou même la Ministre de revenir en arrière. Une annulation du permis de construire ou une modification du projet serait immédiatement attaquée par Vinci. Du côté de la Préfecture on reconnaît la difficulté : « Les conséquences financières sont à prendre en compte » souligne le Préfet. Et au-delà des probables indemnités à payer, le projet pourrait être tout simplement maintenu par la justice.

Vinci a acheté le terrain environ 3 millions d’euros. Ces éventuelles indemnités devraient également couvrir ses frais engagés et son préjudice. Selon la direction régionale du groupe, 90% des logements seraient d’ores et déjà vendus.

Le groupe a tout de même annoncé attendre la décision de la Ministre avant de relancer les travaux.

La pression populaire ne faiblit pas

Une centaine d’habitants étaient réunis ce jeudi devant la Préfecture. Depuis plusieurs semaines, les manifestations s’enchaînent et l’affect est toujours très fort pour sauvegarder l’intégralité du site.

C'est un mouvement amorcé depuis plusieurs années : l’attachement à l’histoire est croissant, tout particulièrement dans le septième arrondissement de la ville. Au-delà des soutiens politiques, il y a une réelle prise de conscience des habitants pour leur héritage. Aujourd’hui c’est la Corderie, demain ce sera la Rampe St Maurice ou l’usine Giraudon à deux pas de la Plage des Catalans.

C’est cette mobilisation qui a permis de suspendre les travaux et qui met dans l’embarras les représentants de l’Etat. Le site a déjà été envahi et le sera certainement à nouveau si le chantier est autorisé. Envoyer des CRS pour déloger des habitants venus protéger des ruines antiques ? Une image forte que les pouvoirs publics veulent à tout prix éviter.

Quelles marges de manœuvre ?

Dans l’attente de la réponse de la Ministre, on affirme qu’il n’existe pas de plan B. Les seules marges de manœuvre seraient donc dans l’aménagement du jardin des vestiges. Trois acteurs sont directement liés : Vinci, qui reste propriétaire du terrain, l’Etat qui a la charge de la gestion du site archéologique et la Ville de Marseille. Restée complètement à l’écart du dossier depuis le début, elle aura cette fois-ci son mot à dire. D’une part, parce que c’est elle qui dispose du droit d’accès sur le chemin qui mène au site, mais surtout parce que ni Vinci, ni l’Etat ne semblent vouloir gérer le site au quotidien.

D’autres pistes pourraient être envisagées comme une modification du projet immobilier ou un décalage de l’immeuble vers la Rue d’Endoume. Mais ces options restent très peu probables aujourd'hui. Malgré la mobilisation populaire, Vinci est en position de force juridiquement et une modification du projet nécessiterait de relancer toute la procédure et peut être de nouvelles fouilles. Après 15 ans de bataille, difficile d’y croire.

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